L’analyse du discours
Dès que le syntagme « analyse du discours » est prononcé, on entre dans la polémique. C’est que quelques-uns des grands thèmes de la linguistique comme la norme et l’usage, le rapport entre langue et société, le statut du sujet parlant, la question de l’interprétation, sont travaillés depuis les débuts de l’AD en France. Il vaut donc la peine de relire les textes qui en constituent la vulgate pour y déceler l’émergence de ces questions, leur développement, et repérer les crises inévitables.
Ce qu’on a appelé l’École française d’analyse du discours, fortement implantée dans la linguistique à partir de l’université de Paris X – Nanterre, ne dure qu’une vingtaine d’années. Cette phase de l’histoire de l’AD prend consistance par une série de productions entre 1969 et 1971, impose des objets d’analyse, pose des méthodes, les met en crise, diffuse abondamment dans des revues, se divise, s’organise en élargissant le champ des disciplines, les interrogations théoriques et les lieux de production, se défait par dissolution en 1983, puis par un certain épuisement de l’expérience de collaboration pluridisciplinaire entre linguistes et historiens.
En 1995 encore, dans Langages 117, numéro de revue coordonné par D. Maingueneau (« Les analyses du discours en France »), malgré le pluriel du titre, tous les articles sauf un s’y réfèrent. Hors de France, en particulier en Amérique latine, au Mexique comme en Argentine, mais surtout au Brésil, elle est une référence privilégiée. Même si le terme « école » est abusif, comme le montrent les problématiques très diverses qui seront exposées dans ce chapitre et le suivant, sa dispersion n’a pas entraîné la fin des références théoriques, et les pratiques s’en inspirent encore…